GO303 : Organisation de l'espace (1)
Analyse spatiale et modélisation des phénomènes géographiques

Claude Grasland
Université Paris VII / UFR GHSS - Licence de Géographie  / Année 2000-2001 / 1er  Semestre

Chapitre 3
SURFACES ET GRADIENTS
(Documents de cours)


A) TYPES DE SURFACES EN GEOGRAPHIE

A.1) Nature de l'information

A.2) Type de collecte A.3) Problèmes d'échelle et de résolution

B) ANALYSE DES PHENOMENES DISTRIBUES SUR UNE GRILLE REGULIERE

B.1 Les opérateurs locaux

B.2 Analyse des formes C) ANALYSE DES PHENOMENES CONNUS UNIQUEMENT EN CERTAINS POINTS

C.1) Techniques d'interpolation

C.2) Surfaces de tendance

Document 1 : TYPES DE SURFACE ETUDIEES EN GEOGRAPHIE

(1) Certaines surfaces sont le produit d'une observation objective dans la mesure où on peut théoriquement définir leur valeur en tout point de la surface de la Terre par une observation directe du phénomène.

(2) D'autres surfaces sont le produit d'une observation subjective dans la mesure où le phénomène concerné n'est pas défini en tous points de la surface de la Terre, ou peut l'être d'une infinité de manières différentes. Dans ce cas, c'est l'observateur (le sujet) qui définit la nature de ce qui est représenté.

(3) La distinction n'est toutefois pas simple car des phénomènes objectifs peuvent faire l'objet de transformations (altitude moyenne dans un rayon de 50 m) ou d'estimations (carte des températures) lorsque l'information est insuffisante.


Document 2 : TYPE D'INFORMATION

L'analyse d'une surface ne sera pas menée de la même manière selon la manière dont les données ont été recueillies

(a) Grille de collecte & niveau de résolution

Même si un phénomène est objectivement continu, le recueil des informations à son sujet se fait toujours à un certain niveau de résolution qui conduit à éliminer de l'analyse une certaine partie de sa variation spatiale. Ainsi, dans le cas de l'altitude, les modèles numériques de terrain comportent toujours un pas de mesure (5m, 10m, 100 m, 250 m, 1 km, …) qui définit l'espacement des points de collecte des altitudes. L'information est donc toujours plus ou moins dégradée (ou échantillonée) ce qui fait que l'analyse ne pourra repérer que des formes spatiales d'un niveau supérieur au niveau de résolution. Il convient en tous les cas de connaître le mode d'obtention d'une information et la méthode d'agrégation ou de reconstitution qui a été employée s'il ne s'agit pas de données primaires :

Agrégation par calcul des valeurs moyennes (lissage)

  =moyenne=>  =moyenne=> 

Agrégation par tirage au sort (échantillonage)

=tir. au sort=> = tir.au sort=> 

(b) Données primaires et données secondaires

On doit également toujours se demander si l'information dont on dispose a fait l'objet d'une collecte directe (information primaire) ou bien si elle a été reconstituée à partir d'un échantillon de valeurs connues uniquement en certains points (information secondaire). Le traitement de données secondaires est toujours délicat car les résultats que l'on va obtenir peuvent être influencés voire faussés par la méthode de reconstitution qui a été utilisée.

Interpolation de données manquantes par moyenne mobile

= interpolation => 


Document n°3 : OPERATEURS LOCAUX SUR GRILLE REGULIERE

On considère un espace rectangulaire E (Xmin, Ymin, Xmax,Ymax) pour lequel on dispose d'une grille régulière de N points (Xi,Yi) affectés d'une valeur Zij.

(a) Voisinages dans une grille

     

    Un voisinage est une fonction de pondération W qui associe à tout point (i,j) une valeur de relation avec ses voisins (et avec lui-même) comprise entre 0 et 1 et telle que la somme des valeurs de W soit égale à 1. Le voisinage peut se limiter aux cellules contiguës ou inclure des cellules plus éloignées.
     
    Coordonnées (i,j) Valeurs de Z(i,j)
    (i-1,j+1)
    (i, j+1)
    (i+1,j+1)
    110
    110
    150
    (i-1, j)
    (i, j)
    (i+1, j)
    80
    100
    130
    (i-1,j-1)
    (i , j-1)
    (i+1,j-1)
    90
    90
    120
    Voisinage 1 Voisinage 2
    0
    1/5
    0
    1/16
    1/8
    1/16
    1/5
    1/5
    1/5
    1/8
    1/4
    1/8
    0
    1/5
    0
    1/16
    1/4
    1/16

(b) Opérateurs locaux

Les opérateurs locaux sont des fonctions f(Z,W) qui à tout point (i,j) de la grille associent une nouvelle valeur qui dépend des valeurs de la variable Z dans son voisinage W. Ils peuvent mesurer la valeur moyenne, la valeur maximale, la valeur minimale, la variance locale, le gradient local, etc. On se limitera ici à 2 exemples : la moyenne locale et le gradient local.

Moyenne locale

Exemple : pour le voisinage 1, la moyenne locale est (80+90+100+110+130)/5 = 510/5 = 102 m
Pour le voisinage 2, la moyenne locale est [ 100/4 +(80+90+110+130)/8 + (110+90+120+150)/16] = 105.7 m

Gradient local :

Exemple : Si la grille a un pas de 250 m, on trouve :
GradX = 50/500 = 0.1 = 10% GradY=20/500 = 0.04 = 4%
L'intensité du gradient est égale à = 10.8%
La direction du gradient est Arctan(0.04/0.10) = 21° ou -158°. Il y a toujours deux solutions de direction opposée et il faut regarder les signes de gradX et gradY pour trouver la bonne solution. Ici, la réponse est -158° ce qui signifie une décroissance ENE/WSW


Document n°4 : INFLUENCE DU NIVEAU D'ANALYSE SUR LE CALCUL DES GRADIENTS


 
 

Sur une carte au 1/50 000e de Clermont-Ferrand, on a réalisé une coupe topographique de direction Ouest-Est, à la hauteur de Chateaugay. Sur cette coupe de 25 km de longueur, on a relevé un échantillon de 100 points d'altitude, régulièrement espacés tous les 250 mètres.

(a) Altitude moyenne et gradients pour un pas de 250 m

(b) Altitude moyenne et gradients dans un voisinage de 2 km

(c) Altitude moyenne et gradients dans un voisinage de 4 km


DOCUMENT n°6 : VISUALISATION D'UN RELIEF
Exemple du Mount St Helens (Etats-Unis)
 
Altitude (non lissée)
Altitude (lissée)
Pentes (non lissées)
Pentes (lissées)
Vue 3D depuis le sud-ouest
Vue 3D depuis le nord-est
Source : Fichier de données livrées avec le logiciel SURFER


Document n°7 : INTERPOLATION ET AJUSTEMENT D'UNE SURFACE CONNUE EN CERTAINS POINTS SEULEMENT

  1. Interpolation à partir d'un échantillon de points connus
Les méthodes d'interpolation permettent de tenter de reconstituer l'ensemble de la distribution d'une surface pour laquelle on ne dispose que d'un échantillon de valeurs connues en certains points de l'espace (ex. station météorologiques). Les méthodes d'interpolation sont très nombreuses et font appel à des notions mathématiques ou statistiques assez difficiles. La méthode la plus simple est l'interpolation linéaire à partir d'une triangulation de l'espace entre les points pour lesquels la valeur est connue. La figure ci-dessous illustre la reconstitution de l'isoligne 80 à l'aide de cette méthode :

(b) Surfaces de tendances

Une autre solution consiste à chercher l'équation d'une fonction Z=f(X,Y) qui s'ajuste le mieux aux informations connues, puis à extrapoler les résultats de cette fonction à l'ensemble de l'espace étudié. On utilise souvent des fonctions polynomiales de degrés plus ou moins élevés pour procéder à de tels ajustements :
 

  • Surface de tendance d'ordre 1 (plan de tendance):

  • Z = aX + bY + c
     
  • Surface de tendance d'ordre 2 (surface quadratique) :

  • Z = aX + bY + cXY + dX2 +eY2 + fX2Y + gXY2+hX2Y2 + i
     
  • Surface de tendance d'ordre n :

  • Z = aX+bY+ …..+ q.XnYn + w

    Les surfaces de tendance d'ordre 1 et 2 sont les plus utilisées car leurs coefficients ne sont pas trop nombreux et peuvent faire l'objet d'interprétations. Dans le cas des plans de tendance (surfaces d'ordre 1), les coefficients a et b permettent de calculer la valeur moyenne du gradient principal et sa direction :

    Intensité du gradient         = racine (a2+b2)
    Direction du gradient        = ArcTangente (b/a)

    On peut également calculer et cartographier les résidus d'une surface de tendance, afin de repérer les exceptions positives ou négatives qui signalent des spécificités locales.


    Document n°8: APPLICATION DES SURFACES DE TENDANCE
    Le PNB/hab. des régions de l'Union Européenne en 1996

    (a) tableau de données (extrait)
     
    CODE
    NOM
    Pib96
    X
    Y
    131
    Abruzzo
    14467
    2382
    1377
    155
    Alentejo
    7512
    546
    1112
    92
    Alsace
    20885
    1891
    2050
    105
    Anatoliki
    8394
    3345
    1389
    74
    Andalucia
    8633
    786
    948
    ….
    ….
    ….
    ….

    (b) Ajustement à une surface de tendance d'ordre 1
    PNB = 0.88 X + 3.90 Y + 7580 (r2 = 19.5%)

    Commentaire :
    On déduit de l'équation que le gradient principal de richesse par habitant à l'intérieur de l'Union Européenne est de direction NNE-SSW. Le calcul du gradient de richesse indique une diminution moyenne de 4 euros/habitants par kilomètre quand on va du NNE vers le SSW. Toutefois, la qualité de l'ajustement obtenue est très médiocre (r2=19.5%) et le modèle proposé ne peut être retenu pour décrire les variations de richesse à l'intérieur de l'Union Européenne.

    (c) Ajustement à une surface de tendance d'ordre 2
    PNB = -20.1 X - 8.28 Y + 0.032 XY + 0.0054 X2 -0.0013 Y2 - 0.0000088 X2Y- 0.000004 XY2 + 0.0000000014 X2Y2 + 14857 (r2 = 51.1%)

    Commentaire :
    L'ajustement à une surface quadratique donne un ajustement nettement meilleur (r2=50%) que dans le cas précédent. En effet, les inégalités de revenus en Europe correspondent davantage à une opposition centre-périphérie qu'à un simple gradient Nord-Sud. On pourrait poursuivre l'analyse en examinant les résidus des régions par rapport à cette surface de tendance d'ordre 2.