Claude Grasland & Pierre Beckouche
Pour une agrégation de géographie ouverte et réformée
(Pétition, Janvier 2001) 

 

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Pétition

POUR UNE AGREGATION DE GEOGRAPHIE OUVERTE ET REFORMEE



Quelques collègues font actuellement circuler une pétition dans laquelle ils dénoncent la réforme en cours de l'agrégation de géographie en des termes polémiques voire désobligeants pour le nouveau jury. Leurs propositions se limitent pour l'essentiel à la défense du maintien ad aeternam du statu quo ante.

Même si l'on peut comprendre que toute évolution provoque des ajustements et nécessite des adaptations, on ne saurait admettre qu'un concours aussi important pour l'image de la géographie que l'agrégation demeure figé sur des positions étroites, et soit réduit à un souci d’"équilibre idéologique" dont on ne voit guère quel rapport il peut avoir avec la pratique scientifique et professionnelle de la discipline.

Des sujets d'oraux tels que "Monde et mondialisation", "Les organisations spatiales centre-périphérie" ou "La ville : espace pratiqué, espace représenté" n'ont rien d'ambigu ou de choquant. Ils sont au moins autant en phase avec l'évolution scientifique de la discipline que des sujets plus classiques du type : "Principes d'une division régionale de la Bulgarie", "Géographie mondiale des textiles" ou "Les formes d'érosion dans les milieux semi-arides".

Et ce n'est pas en préconisant le maintien systématique du commentaire de carte géologique que l'on pourra le mieux défendre la place nécessaire de la composante physique dans l'analyse géographique. Insister, par exemple, sur les questions environnementales et leur interaction avec la dynamique générale des sociétés semble être une façon plus judicieuse de promouvoir une approche unitaire de la géographie qui laisse toute sa place à la géographie physique. La force de la géographie, c’est sa transversalité, voilà la position que nous devons, sur le fond et au-delà des péripéties, défendre et valoriser.

L'actuel jury d'agrégation fait preuve d'un esprit d'ouverture à tous les champs de la discipline, à toutes les sensibilités scientifiques. Ses propositions doivent certes être améliorées et discutées. Mais l'agrégation doit être un miroir de l'état actuel de la géographie. Les soussignés apportent donc leur soutien aux membres du jury et appellent de leurs vœux la poursuite d'une réforme pragmatique menée dans un esprit d'ouverture.

Paris, le 15 janvier 2001
 
 

Pétition a retourner à :

Claude GRASLAND, ou Pierre BECKOUCHE

Université Paris 7 Université Paris I

Institut de géographie

191 rue Saint Jacques

75005 Paris

N.B. Afin que chacun puisse se déterminer en connaissance de cause, nous joignons en annexe à cette pétition le texte rédigé par nos collègues. Un débat démocratique est en effet nécessaire.


Pétition

POUR UNE AGREGATION DE GEOGRAPHIE OUVERTE ET REFORMEE

(Cf. texte au recto)


 
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ANNEXE

Texte intégral de la pétition des collègues de l'Université Lyon 2

UNIVERSITE LUMIÈRE LYON 2 Lyon, 22 novembre 2000

Monsieur le Ministre,

Les enseignants-chercheurs de l'Université Lumière-Lyon 2 impliqués dans la préparation des concours de recrutement de l'enseignement, auxquels se sont joints d'autres collègues géographes, tiennent à vous faire part de leur inquiétude et de leur émotion devant les dérives enregistrées lors du concours 2000 et devant les modifications de fond qui sont intervenues à l'Agrégation de Géographie depuis la session 2000. Ils s'étonnent du caractère hâtif, sinon subreptice, de ce qu'il faut bien appeler une réforme, menée sans aucune concertation avec l'ensemble des représentants de notre discipline.

Vos services s'étaient pourtant engagés par écrit (Mission de la Communication, Bureau de Presse du 20 avril 2000) à n'entreprendre aucune modification des concours en 2001. Comme le précise ce document, " les quelques améliorations proposées relèveront d'un consensus ". Ces modifications, dont la composition ne reflète en aucun cas la diversité des approches et des sensibilités de la discipline géographique, perturbent les préparations en cours dans les Universités et ont introduit des inégalités de traitement entre candidats ; ce fait est inadmissible dans un concours de la Fonction Publique.

  1. -La Géographie s'est trouvée caricaturée dans certains sujets de la session 2000
L'épreuve de géographie régionale exigeait de comparer ce qui, à l'évidence, n'est pas comparable, à savoir la France et la Chine. Des sujets de l'épreuve orale hors-programme s'inscrivent également en rupture complète avec l'esprit du concours, précipitant 1'échec de candidats, non en raison de leur valeur intrinsèque, mais parce que les règles du jeu avaient changé ! Certains seraient fondés en droit à déposer un recours en annulation de la session 2000. Parmi les candidats admissibles, certains ont en effet tiré des sujets (Monde et mondialisation ; La distance ; Les évolutions comparatives de l'organisation spatiale des systèmes productifs ; La ville : espace pratiqué, espace représenté , Les organisations spatiales centre-périphérie ; La production d'espace au Brésil etc ... ) dont la formulation ambiguë peut prêter à différentes interprétations et donner lieu à des querelles épistémologiques qui ne sont pas de mise dans ce concours. L'épreuve prend alors des allures de loterie, tandis que d'autres candidats bénéficient de sujets plus conformes aux préparations assurées à l'Université.

Il faut également déplorer que trop de sujets de géographie régionale rejettent l'échelle infra-étatique et accordent une part excessive à la France, au détriment en particulier du Tiers-Monde et des pays ex-socialistes.

Trop de questions posées à l'épreuve orale du commentaire de documents se traduisent par un appauvrissement de la discipline, en particulier dans sa composante physique. Le rejet trop fréquent de documents relevant des sciences de la nature, comme la carte géologique, se fait au profit d'un discours environnementaliste général et insuffisamment argumenté. Pour autant, les signataires ne sont pas opposés à toute évolution dans la nature des différents exercices, et sont ouverts à une réflexion permettant notamment d'enrichir et de diversifier le contenu de l'épreuve de commentaire de documents, pourvu que cette réflexion soit collective

2 - Pour la session 2001, nous ne comprenons pas le changement radical de thématique scientifique que suppose la modification d'intitulé de la question touchant aux Milieux forestiers.

Il est de tradition que chaque question demeure, inchangée, deux années consécutives au programme, ce que justifie sa lourdeur, tant pour les enseignants qui ont en charge la préparation des cours, que pour les candidats qui affrontent ce concours difficile. le BO n° 3 du 29 avril 1999 indiquait. " les milieux forestiers, étude de géographie physique (question nouvelle, en conformité avec l'arrêté du 23-10-1975, qui stipule : épreuves d'admissibilité, une composition de géographie physique générale (durée 7 heures, coefficient 1). Le BO n° 4 du 18 mai 2000 porte " Les milieux forestiers Etude géographique ", ce qui ouvre très largement le champ de la question vers la géographie humaine et économique, en contradiction avec l'esprit et la lettre du texte qui régit l'organisation du concours.

Nous regrettons cette marginalisation de la géographie physique et son évacuation progressive des programmes et des cursus. A terme, c'est toute la discipline qui en pâtira, ce dont est convaincue une large majorité de notre communauté. C'est d'autant plus grave que les questions d'environnement deviennent de plus en plus une préoccupation majeure de nos sociétés, et que seule la géographie pouvait offrir une approche scientifique synthétique des problèmes d'aménagement, d'environnement et de leurs étroites interrelations. Il est enfin regrettable que la position dogmatique de quelques-uns puisse remettre radicalement en question tout ce qui a fait la richesse et la notoriété à l'étranger de l'école géographique française depuis plus d'un siècle.

3 - Dans l'immédiat, nous partageons l'inquiétude et le désarroi de nos étudiants, confrontés à des querelles épistémologiques qui les dépassent et à des évolutions dont le moins que l'on puisse dire est qu'elles font fi de la nécessaire sérénité et de l'équilibre idéologique qui devraient présider au recrutement de futurs enseignants de qualité.

Nous savons, Monsieur le Ministre, quel est votre attachement à une gestion apaisée et consensuelle de cette maison commune qu'est l'Education Nationale. Nous espérons que vous saurez entendre nos légitimes inquiétudes.

Veuillez agréer, Monsieur le Ministre, l'expression de notre profond respect et de nos sentiments les plus dévoués.

Liste des destinataires :

avenue Pierre-Mendès-France 69676 BRON CEDEX - Téléphone 04 78 77 23 23 - Télécopie 04 78 77 24 26